Communiqué de presse SOUS EMBARGO jusqu’au 25/09/2024
Le Centre d’Appui-Médiation de Dettes et le Réseau Belge de Lutte contre la Pauvreté déposent plainte avec constitution de partie civile à l’encontre de l’étude d’huissiers Modero Anvers du fait de pratiques illégales de recouvrement de dettes.
La plainte porte sur des dossiers à Bruxelles concernant le recouvrement des impayés pour la STIB et de Lijn, dans lesquels le Centre d’Appui a constaté que l’étude d’huissier Modero Anvers comptabilisait des frais illégaux. « Ces violations déontologiques et pénales sont hautement répréhensibles et doivent être condamnées de manière appropriée », déclare Anne DEFOSSEZ, Directrice du Centre d’Appui-Médiation de dettes. « Les huissiers de justice doivent être irréprochables et jouer un rôle exemplaire dans la société. À défaut, c’est la confiance des citoyens dans le fonctionnement du système judiciaire et de l’Etat de droit qui serait ébranlée. »
Des huissiers de justice hors la loi
On pourrait croire que l’intervention d’un huissier de justice – qui est un officier ministériel assermenté soumis à des règles déontologiques strictes – est un gage du respect de la loi. Il n’en n’est rien. Depuis plusieurs années, nos associations constatent des abus flagrants de certaines études d’huissiers de justice ayant parfois pignon sur rue. Au nord comme au sud du pays, décomptes injustifiés, inexacts, harcèlement, menaces et multiplication de frais abusifs se répètent. Dans la présente affaire, le Centre d’Appui-Médiation de Dettes et le BAPN dénoncent les frais illégaux réclamés par Modero Anvers pour des impayés de la STIB et de De Lijn. Les plaignants estiment que les pratiques de l’étude Modero tombent sous le coup des articles 243 et 245 du Code pénal qui punissent les faits de concussion et de prises d’intérêt commis par un fonctionnaire dans l’exercice de ses fonctions.
Abus à répétition
Les faits dénoncés sont loin d’être isolés. Une autre plainte a déjà été déposée en août 2023 à l’encontre de l’étude d’huissiers Modero Anvers pour des dossiers concernant des frais abusifs dans le recouvrement de créances (parking) pour la ville de Malines. Bien connus de la Chambre Nationale des Huissiers de justice et condamnés par elle, ces abus perdurent pourtant. On est en droit de s’interroger sur le contrôle réel exercé sur cette étude quand on sait par ailleurs que son fondateur est le président de la Chambre Nationale des Huissiers de Justice. Sans amélioration du cadre législatif actuel, ces études continueront de développer un véritable business de la dette qui aggrave le surendettement des consommateurs.
De nombreux consommateurs concernés
Si à peine une dizaine d’études sont concernées par les abus constatés, ces dernières représentent une part substantielle du marché du recouvrement de créances. Elles occupent une place économique centrale, tant par leur taille que par leur chiffre d’affaires, et exercent une influence sur
le fonctionnement des petites études qui n’ont pas d’autre choix que de collaborer avec elles. En développant des méthodes et procédures de traitement de masse, ces acteurs se sont taillé une place de choix sur le marché et exercent leurs activités à grande échelle dans de nombreux secteurs, publics et privés : télécoms, eau, énergie, hôpitaux, communes pour les redevances parking, écoles, etc. De très nombreux dossiers sont donc confiés à ces études, exposant un nombre conséquent de consommateurs à leurs fraudes et dérives.
Personne n’en sort gagnant
Les personnes les plus précarisées, socialement et/ou financièrement, sont les plus exposées à ces dérives : « Quand on regarde de plus près la nature des dettes, on voit qu’un grand nombre sont liées non pas à des crédits mais bien à des dépenses de première nécessité que les ménages n’arrivent pas à assumer faute de revenus suffisants : loyer, énergie, santé, etc. », souligne Caroline Van der Hoeven, coordinatrice de BAPN. « Les pratiques abusives de certains huissiers poussent ces ménages plus profondément dans la précarité. Or le créancier ne trouve aucun intérêt à cette situation, puisque la procédure de recouvrement s’en voit ralentie, aboutissant in fine dans une impasse. » Le Centre d’Appui-Médiation de Dettes et le BAPN espèrent par cette action envoyer un signal clair au législateur, aux huissiers, mais aussi aux institutions et entreprises qui recourent à leurs services.
Citations
Anne DEFOSSEZ, Directrice du Centre d’Appui-Médiation de dettes :
« Les huissiers de justice doivent être irréprochables et jouer un rôle exemplaire dans la société. À défaut, c’est la confiance des citoyens dans le fonctionnement du système judiciaire et de l’Etat de droit qui serait ébranlée. »
Caroline VAN DER HOEVEN, coordinatrice de BAPN :
« Quand on regarde de plus près la nature des dettes, on voit qu’un grand nombre sont liées non pas à des crédits mais bien à des dépenses de première nécessité que les ménages n’arrivent pas à assumer fautes de revenus suffisants : loyer, énergie, santé, etc. Les pratiques abusives de certains huissiers poussent ces ménages plus profondément dans la précarité. Or le créancier ne trouve aucun intérêt à cette situation, puisque la procédure de recouvrement s’en voit ralentie, aboutissant in fine dans une impasse. »
Infos & Contacts
Sources complémentaires
Plus de détails et d’exemples étayant et illustrant les constats décrits ci-dessus dans :
- Un article signé par le Centre d’Appui-Médiation de dettes : “Les dérives du recouvrement de dettes des consommateurs“, Revue Droits Fondamentaux et pauvreté, 2023/3
Consultable ici : https://droitpauvrete.be/recouvrement-dettes-revue-3-2023/
- Une étude de l’Observatoire des prix : “Le fonctionnement de marché du secteur des huissiers de justice“, 2022, pp. 35 et suivantes
Consultable ici : https://economie.fgov.be/fr/publications/le-fonctionnement-de-marche-du
Contacts
FR : Anne DEFOSSEZ, Directrice du Centre d’Appui-Médiation de dettes
e-mail : a.defossez@mediationdedettes.be
tél : 0473/690.651
NL : Caroline VAN DER HOEVEN, Coordinatrice du Belgian Anti-Poverty Network
e-mail : caroline.vanderhoeven@bapn.be
tél : 0474/55.96.11
A propos
Le Réseau Belge de Lutte contre la pauvreté (BAPN) s’engage dans la lutte contre les causes structurelles de la pauvreté et de l’exclusion sociale dans toute la Belgique, en partant toujours de l’expérience des personnes en situation de pauvreté. A travers le conseil, le soutien et l’influence des politiques fédérales et européennes, BAPN cherche à obtenir des réformes structurelles qui fassent une réelle différence sur le terrain. Nos analyses et recommandations reposent sur une approche fondée sur les droits et sont élaborées en concertation permanente avec les premières et premiers concernés.
Le BAPN représente aux niveaux fédéral et européen les quatre réseaux régionaux de lutte contre la pauvreté et leurs associations membres où les personnes en situation de pauvreté prennent la parole. Il s’agit des réseaux suivants : le Réseau de Lutte contre la Pauvreté (RWLP), le Netwerk tegen Armoede (NtA), le Forum – Bruxelles contre les Inégalités (Le Forum), le Brussels Platform Armoede (BPA). BAPN fait également partie du Réseau européen de lutte contre la pauvreté (EAPN).
Actif sur le terrain de la médiation de dettes en Région bruxelloise depuis sa fondation en 1999, le Centre d’Appui-Médiation de Dettes a pour mission principale de soutenir l’action des services de médiation de dettes du secteur associatif et du secteur public (créés par les CPAS notamment).
Le Centre d’Appui-Médiation de Dettes forme les médiateurs de dettes. Il les réunit pour permettre des partages d’expériences, le suivi des évolutions législatives et la mise au point d’outils de travail. Des rencontres régulières sont organisées avec les pouvoirs publics, les intervenants judiciaires et les créanciers.
Le Centre d’Appui s’efforce également de mener une réflexion sur la question du surendettement et œuvre, depuis sa création, à améliorer l’accès à la justice, aux droits et à la défense des intérêts des personnes en difficultés financières et/ou en situation de pauvreté.